Laurent Joffrin 2007/3/19. Etat français.
Indigne
C'est un vilain coup électoral que vient de perpétrer Nicolas Sarkozy. Ainsi, la police française a déployé des moyens importants de surveillance et d'enquête pour piéger un exilé qui ne menace plus personne depuis près de trente ans, qui a vécu pendant de longues années une vie effacée d'activiste à la retraite, avant de s'enfuir au bout de la terre pour se fondre dans un oubli inoffensif et mélancolique. Et pourquoi ce geste sans gloire du ministre de l'Intérieur? Pour relancer une campagne dont on sentait bien qu'elle commençait à patiner depuis la percée de François Bayrou.
Il n'est pas question ici de sanctifier Cesare Battisti, ni d'oublier que le mouvement dont il a fait partie a revendiqué des actes sanglants, cruels et plusieurs fois mortels. Son comité de soutien ne croit pas qu'il ait commis de crimes de sang. En Italie, au contraire, beaucoup de personnalités à l'indiscutable moralité démocratique l'estiment coupable. Ecrivain traqué en France, Battisti est tenu en Italie pour un terroriste en fuite.
Mais telle n'est pas la question, au fond. De par les lois italiennes, le prisonnier n'aura pas droit à un second procès qui lui permettrait de faire valoir ses arguments. En son temps, surtout, par la voix de François Mitterrand, la France avait donné sa parole. Elle n'extraderait pas les réfugiés italiens dès lors qu'ils cessaient toute activité, ce qu'ils ont fait. Le ministre de l'Intérieur revient sur cette honorable promesse. L'acte est bas, indigne d'une France généreuse. Paiera-t-il sur le plan électoral ? Rien n'est moins sûr. De droite ou de gauche, le citoyen n'aime pas ces vilenies.